Date :2 Janvier 2024
Si vous n'avez pas encore visité la Boisserie ...
Lors d'une émission de télévision animée par Guillaume Durand, un échantillon de français avait été invité à nommer le plus illustre des français. Une pré-sélection avait proposé Victor Hugo, Bourvil, Marie Curie, ... et bien-sûr Charles de Gaulle. Au terme du sondage, Charles de Gaulle venait en premier. S'en ai suivi un interview du fils Philippe de Gaulle, rappelant quelques anecdotes politiques et familiales.
A quoi peut ressembler la demeure du Général de Gaulle ? Les maisons limitrophes sont de la plus grande simplicité, certaines sont récentes, d'autres doivent nous ramener au XIXème siècle. Les murets sont verdis, les margelles sont noircies, quelques crépis attendent la rénovation, et les abris protégeant les bois pour l'hiver s'affaissent par le poids des années. La rue est étroite, les maisons la bordent sans trottoir, c'est un endroit bien peu perturbé par les moteurs si ce n'est pas ceux des tracteurs du voisinage. Au loin l'église, et La Croix de Lorraine qui dépasse les toits, à propos de laquelle le Général avait dit "Elle incitera les lapins à la résistance".
Le chemin précédant la demeure du Général se situe au sein d'un parc relativement modeste, qui apparaîtrait comme un sentier de seconde zone s'il se situait dans la verdure d'un manoir, et à fortiori dans les jardins d'un château. Nous ne sommes pas dans un cadre prestigieux qui aurait été bâti dans la lumière des rois de France. Les arbustes sont de forme réduite à de simples rectangles, sans ornement ni décoration. La maison du Général apparaît après quelques pas, en forme de "L", tissée de lierre grimpant en tous endroits. Constitué d'un rez-de-chaussée et d'un seul étage, elle n'est ni plus basse ni plus haute que les maisons du lieu. Cette demeure relève du même esprit que celui qui animait le testament du Général, dans lequel il indiquait ne vouloir ni discours, ni distinction nationale, ni cérémonie autre que celle réunissant sa seule famille.
C'est donc une architecture sans discours que celle de cette maison, dont rien ne pouvait laisser à penser qu'elle allait accueillir le plus illustre des français. L'entrée donne immédiatement sur l'escalier vers le premier étage. L'accès est interdit aux visiteurs. Seul le rez-de-chaussée est à visiter. Les premières décorations sont des sculptures en bois, à caractère africain, fixées au mur. Il s'agit sans doute d'un lien avec d'anciennes colonies françaises. A gauche, la salle à manger, réduite à une table de bucheron, et des chaises rustiques, et quelques anciennes vaisselles décoratives au mur. De l'autre côté de cette allée centrale, une pièce de réception, la bibliothèque, et son bureau.
La pièce de réception était, parait-il peu utilisée. Elle est garnie de quelques fauteuils de cuir au confort sommaire, de tableaux et de portraits, notamment ceux des parents d'Yvonne de Gaulle, peints dans la posture endimanchée qui convenait à leur époque. La pièce la plus riche d'enseignements est la bibliothèque. On y trouve les portraits des grands noms du monde, Roosevelt, Churchill, ... jusqu'à celui du roi Hussein de Jordanie. On y trouve la table de bridge sur laquelle le Général s'effondra le 9 Novembre 1970. On y trouve un distributeur de cigares, magnifiquement sculpté, offert par Fidel Castro - La signature pourra en étonner certains. Et tout autour de cette pièce, quelques centaines de livres, dont on peut penser qu'ils furent ceux du Général, sans main réorganisatrice. Les livres parlent de l'histoire de France, de Napoléon, des guerres, et toute une partie est consacrée aux grands écrivains français. On y voit aussi un livre volumineux intitulé "Le monde musulman", un livre sur Hitler. Mes yeux ont été attirés par la présence le livre de Léon Delarbre, résistant, peintre français qui fit un ouvrage de croquis présentant ce qu'il vécut en déportation (Auschwitz, Buchenwald, Bergen, Dora).
Puis le bureau. Une petite pièce hexagonale dont la fenêtre principale donne sur des kilomètres de vallées et de bois. L'entrée est bien-sûr interdite, mais l'on peut y observer tous les détails. En la regardant de plus près, on peut imaginer le Général y écrivant ses mémoires. En sortie de demeure, on peut faire le tour du parc, lisant ici ou là quelques panneaux explicatifs. Et l'on regarde le portail qui nous fait quitter les lieux. Plus loin, se situe le musée où l'on retrouve quantité de photos, médias, témoignages sur le parcours de De Gaulle. Et adossé à l'église, se trouve le cimetière, dont la première tombe, à gauche, est celle de la famille De Gaulle. A se trouver devant cette tombe chrétienne, blanche et sobre, on sonde la profondeur des racines dans lesquelles il a réalisé son parcours, mais on y lit aussi une certaine modestie devant l'éternité, à l'opposé de l'envergure qu'il eut aux temps des combats.
A titre personnel, me sont revenus, devant sa tombe, les mots de Victor Hugo terminant les Misérables, décrivant la tombe de Jean Valjean :
"Il y a, au cimetière du Père-Lachaise, aux environs de la fosse commune, loin du quartier élégant de cette ville des sépulcres, loin de tous ces tombeaux de fantaisie qui étalent en présence de l'éternité les hideuses modes de la mort, dans un angle désert, le long d'un vieux mur, sous un grand if auquel grimpent les liserons, parmi les chiendents et les mousses, une pierre. Cette pierre n'est pas plus exempte que les autres des lèpres du temps, de la moisissure, du lichen, et des fientes d'oiseaux. L'eau la verdit, l'air la noircit. Elle n'est voisine d'aucun sentier, et l'on n'aime pas aller de ce côté-là, parce que l'herbe est haute et qu'on a tout de suite les pieds mouillés. Quand il y a un peu de soleil, les lézards y viennent. Il y a, tout autour, un frémissement de folles avoines. Au printemps, les fauvettes chantent dans l'arbre. Cette pierre est toute nue. On n'a songé en la taillant qu'au nécessaire de la tombe, et l'on n'a pris d'autre soin que de faire cette pierre assez longue et assez étroite pour couvrir un homme."
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